jeudi 13 septembre 2018

L'Été des quatre rois - Camille Pascal


CHRONIQUE DE SCARLETT

Résumé :  " Il y avait ce matin-là beaucoup de monde à Saint-Cloud, la Cour bien sûr, mais aussi les ministres, il jurait même que monsieur de Talleyrand avait fait sonner dès la première heure son pied bot cerclé de fer sur les marbres de l'escalier d'honneur. La galerie d'Apollon n'avait jamais été aussi peuplée, et les jardins s'animaient de femmes heureuses d'y promener leurs traînes. Le grand lever serait long, et l'on entreprenait déjà le premier gentilhomme de la chambre pour obtenir les entrées. À l'évocation de son grand chambellan, le roi sourit : si même le diable boiteux courait à Saint-Cloud lui présenter ses hommages de gentilhomme et prendre sa place de courtisan, alors la France était prête." Ainsi commence L'Été des quatre rois. Juillet-août 1830, la France a connu deux mois uniques dans son histoire avec la succession sur le trône de Charles X, Louis XIX, Henri V et Louis-Philippe.
Dans cette fresque foisonnante, à l'écriture ciselée, tandis que le peuple de Paris s'enflamme, Hugo, Stendhal, Dumas, Lafayette, Thiers, Chateaubriand, la duchesse de Berry, Madame Royale assistent à l'effondrement d'un monde.  Des "Trois Glorieuses" à l'avènement de la monarchie de Juillet, Camille Pascal nous plonge dans le roman vrai de la révolution de 1830.



Chronique :  
 



« -Je ne veux pas monter en charrette comme mon frère, je ne reculerai pas d’un pied. Je préfère encore monter à cheval…
-Je crois, Sire, que le moment n’est pas éloigné où vous serez obligé d’y monter. »


A peine deux mois d’Histoire en quelques 600 pages d’un livre qui foisonne des détails de la vie protocolaire d’un roi (un Bourbon cette fois ci)  mais qui nous explique aussi les arcanes politiques de l’époque,  voilà le pari réussi de Camille Pascal avec son roman « L’été des quatre rois » qui nous décrit  pourquoi  et comment Charles X fut contraint d’abdiquer  au profit du duc d’Orléans.

On débute donc le livre avec Charles X, roi âgé sur le trône depuis quelques années et dont les actions, les décisions sont influencées  par l’histoire traumatisante de ses frères Louis XVI  et Louis XVIII. Charles donc, veut redonner de la puissance à la monarchie en validant des ordonnances qui  vont très vite mécontenter le peuple et les révolutionnaires et les républicains. En 1830, le peuple en effet ne supporte plus les Bourbons, la révolution est passée par là et donc cette grogne se traduit par une fronde ou le peuple lassé s’agite, les politiques s’activent, les rois se succèdent et les poètes et écrivains regardent et relatent.

Charles X donc veut restaurer une monarchie, il représente la fin d’une lignée celle de la branche ainée des Bourbons, il refuse le compromis d’un pouvoir partagé et semble dépassé et confit dans un héritage passé et révolu .Sa fuite de Paris vers la Normandie est un remake crépusculaire de ce que certains de ses illustres ancêtres ont vécu. Le Dauphin de France qui est aussi duc d’Angoulême et Henri d’Artois autre petit-fils de Charles X ne verront rien de leur accession au trône royal, l’un abdique avant que d’être nommé et le second est devancé par le quatrième roi de cet été mouvementé : Le duc d’Orléans. Celui-ci sous le nom de Louis Philippe 1er sera le roi de la monarchie de Juillet, il est soutenu par Thiers. Etant plus moderne et affichant moins sa royale lignée, il représente un choix consensuel parfait pour la transition qui se prépare. 

L’auteur nous fait partager tous les évènements en « live » pratiquement et nous fait voyager des uns aux autres de ce qui partent à ceux qui arrivent partageant leurs pensées et leurs manœuvres.
On croise d’illustres personnages comme Chateaubriand qui revient sur Paris pour écrire l’Histoire et on aperçoit Alexandre Dumas ou Alfred de Vigny ainsi que l’illustre Victor Hugo  entre autres célébrités.

On traverse cette période des trois glorieuses avec Thiers qui recherche un nouvel ordre institutionnel, le prince de Polignac ultraroyaliste et très impopulaire mais aussi avec Talleyrand qui a survécu à tous les régimes qui viennent de se succéder et La Fayette toujours aussi populaire, le « héros des deux mondes » qui court après une gloire passée. On comprend là encore le pouvoir  souterrain de grandes femmes comme Adélaïde la grande Mademoiselle, la duchesse de Berry belle-fille de Charles X , Madame Récamier la tendre amie de Chateaubriand ou encore la comtesse de Boigne aux premières loges de la révolution de Juillet. 

L’auteur nous fait voyager aussi dans des lieux historiques magiques comme le Palais Royal, les Tuileries, Versailles, le château de St Cloud et Paris bien évidemment.

Il y a des fantômes illustres dans ce roman qui pèsent sur l’histoire comme Louis XVI, XVIII et Napoléon, tous là pour nous rappeler que l’Histoire est une suite  d’évènements mais surtout d’hommes et de femmes inoubliables. Ce livre, très détaillé et écrit de manière vivante tel un feuilleton  plein de rebondissements nous raconte aussi l’agonie d’une dynastie de dinosaures qui se meure et l’histoire sans fin des luttes de pouvoir, des luttes sociales, du va et vient politique au gré d’un été.

Ce fut une très plaisante et enrichissante lecture.

« Chateaubriand, épuisé par son propre talent, souriait amèrement à ce chiffre fatidique de quatre -vingt-neuf, qui renvoyait encore une fois la mesquinerie du présent au tragique de l’Histoire. »




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