Merci à Hélène Fournier pour ses réponses !
Photo : MicMag.net
- Comment
avez-vous été amenée à devenir traductrice ? Que représente la traduction pour
vous ?
H.F. :
J'ai pris des chemins de traverse. Ma prof de
français au
lycée a joué un rôle très important,
j'étais dans une section scientifique et grâce à elle j'ai découvert notre
langue et j'en suis tombée amoureuse. Je suis restée en lien avec cette
enseignante jusqu'à sa mort, il y a à peine quelques mois qui, je dois
l'avouer, m'a énormément secouée. Après un bac scientifique, j'ai fait une
licence d'anglais puis une licence de droit et j'ai longtemps travaillé en
entreprise comme assistante bi ou trilingue. Travail purement alimentaire qui
ne me plaisait pas du tout. Puis j'ai eu la chance, par le biais de rencontres,
de découvrir le monde de l'édition et au même moment était créé un DESS de
traduction littéraire à Charles V (Paris). J'ai été admise et cette année a été
un véritable déclic. J'ai compris que l'anglais n'était pour moi qu'un outil,
que mon plaisir était d'écrire en français…
- Avez-vous
des genres de prédilection ? Des préférences en terme de genre littéraire, de
nationalités pour traduire (anglaise, américaine, etc.) ?
H.F. : Non. Enfin si. J'ai traduit des documents,
des "beaux livres" essentiellement sur les Indiens des États-Unis,
d'ailleurs c'est par ça que j'ai commencé. Mais à partir du moment où j'ai pu
plonger dans la traduction de roman ou de nouvelles, j'ai su que ma place était
là. Traduire de la fiction.
Par ailleurs, j'ai traduit des romanciers anglais
et américains. Pas d'autres nationalités anglophones et ça me convient très
bien.
-
Pouvez-vous nous raconter comment s'est déroulée votre toute première
traduction ?
H.F. : En fait c'était sur un document, donc je ne
sais pas si ça vous intéresse. Quant à la fiction, un hasard, une éditrice qui
avait fait passer des tests pour traduire Helen Dunmore et qui apparemment ne
trouvait pas la bonne personne. J'ai été l'heureuse élue.
- Quelle a
été votre traduction la plus plaisante ? La plus difficile ? [Ou alors faire un
petit panorama/résumé de vos traductions ?]
H.F. : Ca fait une petite vingtaine d'années que je
traduis et je peux vous dire qu'aucune traduction n'est facile. Pour résumer,
je vous partage une citation de Proust qui me parle.
"Il y a des jours montueux et malaisés qu'on met un temps infini à
gravir et des jours en pente qui se laissent descendre à fond de train en
chantant."
Quand je traduis un livre, je passe par ces
phases-là, quel que soit le livre (et en ce moment, j'ai plutôt tendance à
peiner). Mais il
y a des moments formidables quand, par exemple, je trouve la "voix"
de tel ou tel personnage ou quand je sens que se dégage d'un passage traduit
une atmosphère qui va bien au-delà des mots.
- La
collection Terres d'Amérique d'Albin Michel est une sorte de monument éditorial
pour tous les amoureux de la littérature américaine, qu'est-ce que cela vous
fait de faire partie de ses traducteurs ?
H.F. : J'en suis ravie, les sept auteurs que je
traduis en font partie et je m'y sens bien.
- Quelles
seront vos prochaines traductions ?
H.F. : Dan Chaon vient de rendre son nouveau roman
à son éditeur. Et comme c'est un auteur que j'admire énormément, j'ai toujours le
trac, la peur de ne pas être à la hauteur. Traduire Dan est un de
mes défis professionnels majeurs.
- Un conseil
pour des personnes qui souhaiteraient exercer votre métier ?
H.F. : Je ne suis pas sûre d'avoir des conseils à
donner. Mon fil conducteur est l'exigence, le respect de l'auteur et du lecteur,
tendre vers l'invisibilité. Et pour moi, ça passe par un dialogue constant avec
l'auteur pendant tout le processus de traduction.
Questions
de Grybouille :
Tout d’abord Hou HOU*, Mme Hélène Fournier pour vos réponses
à venir, heu.. . ou avenir.
First, M
Willy Vlautin nous sort une ballade, en tant que traductrice était-ce
une ballade ?
Hélène Fournier
Si pour vous une ballade est un poème de forme libre, alors oui. En
fait, ce fut une expérience unique. Willy est un auteur mais aussi un musicien,
c'est un artiste. Son écriture m'a semblé moins littéraire que celle de mes
autres auteurs, et je ne porte là aucun jugement. Ca m'a déstabilisée au début
tout en m'offrant une liberté que je n'avais peut-être encore jamais
expérimentée.
Second, Comment avez-vous été amenée à traduire cet auteur ?
Hélène Fournier
Mon
éditeur me l'a proposé.
Thirdly, avez-vous déjà rencontré l’auteur et si,
oui, comment la rencontre s'est-elle passée ?
Hélène Fournier
Nous nous sommes
rencontrés la semaine dernière, nous avons passé de longues heures ensemble et nous avons
échangé sur son prochain roman ainsi que sur ma façon de travailler. Et sur Ballade pour Leroy, bien sûr. L'auteur
me touche infiniment, l'homme aussi et je crois que lui
comme moi serons heureux de retravailler ensemble.
Fourth, le passage qui vous a le plus touché lors de
votre traduction ?
Hélène Fournier
Je dois vous dire que j'ai traduit ce livre en 2014, je crois. Entre-temps,
il y a eu d'autres auteurs, d'autres traductions, d'autres personnages, et je
ne garde pas tout en tête. Mais les personnages de Pauline et Freddie m'ont
bouleversée et j'ai pris un immense plaisir à cheminer plusieurs mois à leur
côté. J'ai été très touchée par leur dignité, leur élégance, une magnifique
leçon de vie.
Alter, Si vous
aviez à ranger dans une palette de couleurs les pages que vous avez traduites,
vous seriez dans quelles nuances, Chaudes, froides, lumineuses, dark.. . ?
Hélène Fournier
Toutes les couleurs, vraiment, de la noirceur à la lumière.
super interview !
RépondreSupprimerC'est vrai qu'il faudrait mettre les traducteurs plus à l'honneur, j'ai lu Ballade pour Leroy ainsi que Kentucky Song suite à vos chroniques et je compte lire les deux autres que je vois en photo :-)
RépondreSupprimerTrès jolie idée d'interview ! Merci de nous avoir permis d'en apprendre un peu plus sur le métier de traductrice, c'est très intéressant :)
RépondreSupprimerMerci pour cet interview! Hélène Fournier est une grande traductrice et fait un boulot formidable.
RépondreSupprimerJ'ai très hâte de lire "Ballade pour Leroy" et d'enfin découvrir Dan Chaon.
Merci Marie-Claude, je suis très touchée !
SupprimerOn parle assez peu des traducteurs, effectivement, et c'est dommage, parce que certains sont vraiment excellents et arrivent vraiment à rendre une atmosphère et une voix fidèle au livre d'origine.
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