CHRONIQUE DE SCARLETT
Résumé : Le train arrive dans la petite gare de Thyanne, terminus de la ligne. Priam Monet descend pesamment d’un wagon. Presque deux mètres pour un bon quintal et demi, mal sapé et sentant le tabac froid, Monet est un flic misanthrope sur la pente descendante. Son purgatoire à lui c’est d’être flic à l’IGPN, la police des polices. Sa mission : inspecter ce petit poste de la police aux frontières, situé entre les Alpes françaises et italiennes. Un bled improbable dans une vallée industrieuse où les règles du Far West ont remplacé celles du droit. Monet n’a qu’une idée en tête, accomplir sa mission au plus vite, quitte à la bâcler pour fuir cet endroit paumé. Quand on découvre dans un bois le cadavre d’un migrant tombé d’une falaise, tout le monde pense à un accident. Pas Monet. Les vieux réflexes ont la peau dure, et le flic déchu redevient ce qu’il n’a cessé d’être : un enquêteur perspicace et pugnace. La victime était-elle un simple migrant? Qui avait intérêt à la faire disparaître? Quels lourds secrets cache la petite ville de Thyanne? Monet va rester bien plus longtemps que prévu.
Chronique :
« C’est normal que tu t’ébaudisses, gamin…Avec votre saloperie de couvercle jaunâtre de citadins, votre pollution lumineuse, comme on dit, vous n’avez plus conscience de l’univers. Dans votre monde n le regard est emprisonné par le béton et les tours. Vous voyez court. Ça vous rend con, mais c’est pas votre faute.»
Des personnages attachants vraiment attachants, qui vous sembleront familiers pour certains, une enquête policière ancrée dans le réel, rondement menée, une écriture fluide, cadencée, un humour qui fait mouche et une histoire humaine, un environnement montagneux qui sont des plus dans ce polar à ne pas manquer.
L’histoire se déroule à Thyanne, petite ville alpine à la frontière entre la France et l’Italie. C’est une ville assez moche et triste au look un peu passé, industriel et miteux. Priam Monet y est parachuté pour une inspection de routine. Mais au même moment, un promeneur y découvre le cadavre d’un supposé migrant. La substitut du procureur décide de confier l’enquête à Priam qui se sent revivre devant l’énigme à résoudre.
Dans ce polar, vous l’aurez compris le personnage principal se nomme Priam Monet. Déjà le nom du policier est particulièrement savoureux. On pourrait dire que son prénom est au premier abord une des rares choses poétiques chez ce flic à l’apparence gargantuesque, plutôt désabusé, et totalement grincheux. Il travaille à l’IGPN la police des polices. Il est donc rarement le bienvenu chez ses confrères et le leur rend bien. En fait, Priam ne supporte pas grand-chose. Il est en colère contre tout et tout le monde, les blessures que lui ont infligé les remarques dues à son apparence n’y sont certainement pas étrangères… « Fait chier, jura-t-il, je déteste cette saloperie de foret. Je déteste la montagne et je déteste cette putain de nature ». C’est un homme très touchant, attachant avec une fragilité cachée sous des tonnes de hargne.
Priam côtoie durant cette enquête Claire Mongel policière reléguée depuis des lustres au secrétariat du commissariat de Thyanne. Elle est mariée à un garde forestier, a deux enfants et connaît bien les gens du cru. C’est une femme sympathique qui se découvre durant l’enquête, se dévoile plus volontaire et Priam en lui proposant de collaborer à cette enquête lui donne l’opportunité de s’épanouir.
On croise durant notre lecture Louis Chappaz le big boss de Thyanne et des alentours qui se prend pour le roi de la ville, Sophie Berling la substitut du procureur belle femme très professionnelle, et toute l’équipe des policiers collègues de Claire comme Maurice le chef de police, Servier le patron et Ludo l’administratif.
Le lecteur fait aussi la connaissance de Roc Mougel un personnage authentique et fort sympathique qui héberge Priam dans sa ferme, ainsi que sa fille Marie journaliste et productrice de fromage.
Comme je vous l’ai dit l’écriture de Laurent Guillaume est efficace, rythmée et il nous offre des moments authentiques dans une ferme alpine où on discute en buvant de la gentiane. Il nous décrit la vie d’une petite ville où tout le monde se connaît, certains habitants reclus dans leurs certitudes, d’autres plus ouverts, certains patrons de tout, d’autres sans le sous.
Laurent Guillaume nous livre des petits détails tellement réels comme l’odeur de la grenadine dans les vieux bistrots alors qu’on y boit plutôt des demis. Et en plus l’auteur nous offre des échanges savoureusement drôles : « gros lard, gros sac, cachalot, hippopotame, cria-t-il…Je ne te blâme pas de ne faire preuve d’aucune originalité, j’entends les mêmes vannes depuis une quarantaine d’années. C’est déjà pas mal que le fruit d’une lignée de baiseurs de chèvres puisse s’exprimer dans un français rudimentaire. »
Un livre à ne pas manquer pour votre été, un auteur à suivre vraiment, et un personnage aussi ; s’il vous plait Monsieur Guillaume.
« J’ai toujours été gros, dit-il les yeux fixés devant lui. Gosse, j’étais déjà en surpoids et vous connaissez l’ouverture d’esprit des gamins à cet âge. Mes camarades se sont ingéniés à m’apprendre la distance vis-à-vis de moi-même ».
Tout à fait d'accord avec toi... Je veux les revoir ensemble !
RépondreSupprimerUn auteur que j'apprécie. Titre noté, forcément.
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