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mardi 3 septembre 2019

Le ciel par-dessus le toit - Nathacha Appanah

Chronique de Scarlett

Résumé : «Sa mère et sa sœur savent que Loup dort en prison, même si le mot juste c’est maison d’arrêt mais qu’est-ce que ça peut faire les mots justes quand il y a des barreaux aux fenêtres, une porte en métal avec œilleton et toutes ces choses qui ne se trouvent qu’entre les murs. Elles imaginent ce que c’est que de dormir en taule à dix-sept ans mais personne, vraiment, ne peut imaginer les soirs dans ces endroits-là.» Comme dans le poème de Verlaine auquel le titre fait référence, ce roman griffé de tant d’éclats de noirceur nous transporte pourtant par la grâce de l’écriture de Nathacha Appanah vers une lumière tombée d’un ciel si bleu, si calme, vers cette éternelle douceur qui lie une famille au-delà des drames.






Chronique :





"Qui dit que les choses sont écrites d’avance, qui dit que nous sommes des pantins et qui peut savoir comment la vie va se dérouler ?
Une mère et sa fille, oreilles tendues, en silence, de chaque côté d’une porte noire. Il y a tant de possibles encore."


 « Le ciel par-dessus le toit » de Nathacha Appanah  est un court roman où le lecteur vit de façon alternée les réflexions, les sensations, les émotions de chacun des protagonistes de cette sublime histoire de tragédie et de rédemption. L ‘auteur nous livre un conte pour adultes, où les fées ne se sont pas penchées sur les berceaux, un conte plein d’une poésie douce-amère porté par une écriture délicate, sensible et instinctive.

Dans ce conte, on rencontre Loup, jeune homme précieux et doux mais si différent qui fait des crises d’angoisse, parle peu et fait des rimes dans sa tête (pirouette, cacahouète). Loup est emprisonné pour avoir voulu revoir sa sœur qui lui manque depuis dix ans, Loup qui a besoin de courir pour calmer les vents qui se bousculent dans sa tête. Paloma, c’est la sœur que Loup cherche à rejoindre. Elle fut une enfant transparente, évanescente pour se protéger de l’aura maternelle si puissante, si toxique aussi. Elle est un peu en retrait de la vie, et organise son quotidien dans une vie qu’elle souhaite paisible et tout « doucement et gentiment ». 

Toute à l’opposé est Phénix  leur mère, une  rousse flamboyante et pleine de colère qui s’est choisi une vie où des dragons et des oiseaux multicolores se dessinent sur son corps et qui par crainte que ses enfants deviennent trop faibles, trop fragiles devient une mère acérée, tranchante. Avant Phénix s’appelait Eliette, mais c’était avant quand ses parents faisaient d’elle une poupée modèle, un beau jouet précieux qu’on exhibe sans penser à mal et puis le costume est devenu trop brillant, étroit et artificiel et Eliette s’est mise à étouffer devenue le point focal des regards souvent concupiscents et parfois malsains. Alors elle a tout envoyé balader Eliette et elle s’est choisi un autre nom mais tous les choix ont des conséquences et celles-ci peuvent s’apparenter à Loup dans cette prison, à Phénix et Paloma tous les trois ballotés par la vie.

Ce livre est un vrai coup de cœur, un livre qui vient des tripes avec des personnages flamboyants d’une humaine fragilité. Ce sont des âmes blessées, magnifiques et sublimées par l’écriture de l’auteur. Nathacha Appanah nous livre des héros oubliés dont les vies se font à l’écart, ces êtres en dehors des cases pour toutes ces raisons qui vous exilent en marge de la société et qui doivent apprendre à survivre dans un monde qui ne leur donne ni espace ni réalité.

Merci Madame pour ce très beau roman.

"Parfois, on aimerait savoir, n’est-ce pas, la nature exacte des paroles ; leurs poids sur les âmes, leur action insidieuse sur les pensées, leur durée de vie, si elles sucrent ou rendent amers les cœurs."




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