CHRONIQUE DE SCARLETT
Résumé : En 1381, la grande peste et la Guerre de Cent ans ont ruiné le royaume
d’Angleterre. Quand le roi décide d’augmenter les impôts, les paysans se
rebellent. Parmi les héros de cette première révolte occidentale : John
Wyclif, précurseur du protestantisme, Wat Tyler, grand chef de guerre,
John Ball, prêtre vagabond qui prône l’égalité des hommes en s’inspirant
de la Bible. Mais on trouve aussi des femmes, dont Joanna, une Jeanne
d’Arc athée, qui n’a pas sa langue dans la poche et rejoint cette
aventure en se disant que, puisque l’on parle d’égalité, il serait bon
de parler d’égalité homme-femme…
Chronique :
« En
vérité, en eux s’est allumé ce sentiment diffus que nous avons tous ressenti
qui en attendant un Magnificat de Bach,...,qui en entendant le murmure du vent
entre les herbes :ce sentiment que l’Humanité nous contient , nous emporte
et nous élève plus haut que nous ne serons jamais, ..,cette certitude que
l’homme est juste et bon , que ce monde atroce n’est qu’une illusion et qu’il
vaut d’être vécu, la Foi, en somme.»
Décidément la rentrée littéraire me met sur le chemin de l’Histoire et plus particulièrement sur le chemin des Plantagenêt .Dans « Et j’abattrai l’arrogance des tyrans » son premier roman, Marie-Fleur Albecker nous transporte en 1381 en Angleterre, à Fobbing plus précisément où la guerre de cent ans a épuisé les petites gens, et où les taxes qui alourdissent leur misère les rendent enfin vindicatifs et prêts à en découdre. L’auteur nous conte donc une histoire dans la grande, celle de la révolte contre l’injustice des impôts toujours trop élevés, celle d’une révolte qui embrase tout le pays contre les nobles.
Dans ce roman nous cheminons avec Johanna Ferrour, jeune femme vivant à
Fobbing. C’est une personne qui aime se promener dans les marais et y réfléchir
et penser à tant de choses qu’une femme à cette époque ne doit pas concevoir
comme la place de la femme justement dans la société, pourquoi des pauvres et
des riches, pourquoi tant de différences existent -elles ? Elle est
tellement moderne pour son époque, révoltée par l’injustice, une pionnière féministe
et humaniste. La rébellion embarque Johanna en même temps que tous les manants
de l’Essex et du Kent, tout y passe la rage de subir en tant que femme, en tant
que pauvre, en tant qu’individu.
On croisera aussi la route des meneurs de cette révolte, les Watt Tyler et
les Jakke Carter mais aussi John Ball, prêtre et prédicateur zélé contre les
puissants qui sait enthousiasmer les foules pour leur expliquer la légitimité de la révolte. Le lecteur fera
aussi la connaissance de William Ferrour, qui a épousé Johanna pour se racheter
et parce qu’il l’admire un peu puis beaucoup, paysan aisé qui suit le gros de
la troupe sans grande conviction. Durant ce récit on verra aussi des Monsieur
ou Madame « tout le monde » comme Robert Belling, la voix d’une
raison qui se justifie d’y aller au conflit mais pas trop quand même (on râle
un peu, mais bon rester à la maison à protéger son pré carré c’est bien aussi).
Et enfin sur le chemin de la révolte nous rencontrerons Richard II Plantagenêt,
ainsi que sa mère, mais aussi les puissants comme Hales , Sudbury, figés dans
leurs privilèges , leur lignée , leur argent ; si éloignés des besoins du
peuple , dédaigneux ,condescendants et pour le roi si persuadé de son pouvoir divin que le dialogue est
impossible.
Le roman de Madame Albecker est court, en quatre parties qui symbolisent
les phases d’une révolution. L’écriture de l’auteure est pour moi un petit
régal, qui mélange le vocabulaire, le phrasé du 21eme siècle avec l’histoire du
14è pour nous expliquer que finalement, avant,
maintenant, même combat… avec une ironie cinglante et joyeuse.
Ce livre nous parle de Londres à cette époque mais aussi de la peste, le
fléau noir de ce siècle. On s’instruit aussi, on apprend ce qu’est le
« plaid », on parle de la Tamise, de l’influence des religions dans
le politique et de l’importance de la foi qu’elle soit divine ou terrestre pour
porter les rêves. Et surtout l’auteur nous questionne sur la liberté,
l’égalité, les révoltes. C’est d’une intemporalité absolue, frais et vivifiant.
C’est un livre de conscience sociale quelque part, de réveil, mais aussi d’une
profonde humanité, d’une poésie simple et sincère.
J’ai adoré ce premier roman, merci Madame pour cette excellente lecture qui
réveille et questionne en moi la femme, la citoyenne et l’être humain…
«C’est en chœur,
dans ces moments d’unité, de communion, peut-être fugaces mais pleins d’une
émotion réelle, c’est la peut-être que se font les révolutions- toutes les révolutions,
celles qui renversent pour toujours l’ordre politique, mais aussi les petites
révolutions, celles qui se font dans nos têtes, dans nos corps et dans nos
cœurs ,celles qui bouleversent à jamais notre façon de voir le monde… »
Owi je veux volontiers le lire ! De ce que tu en dis, Scarlett, j'ai très envie de me plonger dedans :)
RépondreSupprimer