Chronique de Scarlett
Résumé : Le suicide d’un adolescent, le deuil d’un parent.
Le dialogue qu’imagine une mère avec son enfant pour continuer à lui
parler, à l’entendre, à le faire exister. Le cache-cache intellectuel de
deux esprits marqués par le sceau de la création.
Après le très brillant Cher ami, de ma vie je vous écris dans votre vie, qui fut en lice pour le prix Médicis et le prix du Meilleur livre étranger, Yiyun Li rend un hommage plein de tendresse, de poésie et de pudeur à son fils, et mêle magnifiquement l’intime à l’universel : la douleur après la perte d’un être cher, le refuge que constituent les mots et, plus largement, la puissance cathartique de la littérature.
Après le très brillant Cher ami, de ma vie je vous écris dans votre vie, qui fut en lice pour le prix Médicis et le prix du Meilleur livre étranger, Yiyun Li rend un hommage plein de tendresse, de poésie et de pudeur à son fils, et mêle magnifiquement l’intime à l’universel : la douleur après la perte d’un être cher, le refuge que constituent les mots et, plus largement, la puissance cathartique de la littérature.
Chronique :
"Mais moi, que pouvais-je attraper en cette
matinée grise et humide ? Ni le sourire sur ton visage, ni la lumière dans
tes yeux, ni un chat bleu, ni un pingouin violet, ni la poussière dans le vent, ni une pensée
murmurée dans tes oreilles, si bruyante qu’elle avait étouffé toute la musique
du monde. Que puis-je attraper, mon enfant, maintenant que tout est devenu
invisible ?"
Dans La douceur de nos champs de
bataille de Yiyun Li , une
mère s’invite dans un dialogue avec son fils qui s’est suicidé. Leurs échanges
sont sublimement intimes, tristes, bouleversants. Une mère devant l’inexorable
et qui puise dans chaque échange le courage de continuer. Yiyun Li nous livre des
conversations savoureuses, où Nilolai le fils de l’auteur reste fidèle à
lui-même gentiment ironique et sans concession envers sa mère. Un fils qui lui
demande d’être plus rigoureuse dans ses propos, d’être plus juste dans ses
mots, d’éviter les clichés, son fils qui l’aime assez pour la secouer de l’engourdissement
qui s’installe en elle.
Les pensées philosophiques, les questions existentielles sur la vie, le
temps, l’amour jalonnent ce pudique roman. Le lecteur y découvrira des
réflexions sur l’homme et son impermanence. Dans les tête à tête que l’auteur
se crée avec son fils, elle parle de l’importance des mots, des adjectifs, de
la précision et de l’exigence que son enfant semblait apporter à ceux-ci.
Écrire sur l’absent, disparu brutalement, violemment et écrire malgré tout
avec un ton si poétique, aimant et transcendant. Quel magnifique hommage à cet
enfant disparu, Nilolai enfant précoce qui aimait cuisiner, la musique, les
fleurs…
Un très émouvant et beau roman.
"Jeune, je ne connaissais pas le goût du chagrin
Mais j’aimais tant monter les tours à étages
J’aimais tant monter les tours à étages
Pour composer un nouveau poème et singer le chagrin
Maintenant que j’ai senti le goût du chagrin
Et que je veux en parler, je me retiens
Je veux en parler, mais je me retiens
Et je dis simplement : une journée froide, quel bel automne
Est-ce un bel
automne ? demanda-t-il.
Oui, répondis-je.
Et une journée froide".
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