Solitudes - Niko Tackian

 CHRONIQUE DE SCARLETT

Résumé : Élie Martins est garde nature dans le massif du Vercors. Il y a douze ans, une blessure par balle l’a laissé totalement amnésique. Depuis, il s’est reconstruit une vie dans cette région aux hivers impitoyables, aux brumes si opaques qu’elles vous égarent en deux pas. Alors qu’une tempête de neige s’abat sur le Vercors, des traces étranges mènent Élie jusqu’à l’« arbre taillé », un pin gigantesque dressé comme un phare au milieu de l’immensité blanche. Une femme nue est pendue à ses branches. Cette macabre découverte anime quelque chose sur la toile vierge des souvenirs d’Élie.

 

 

 

 

 

Chronique :

"Le bleu de l’apaisement, le rouge de la colère, les vagues dorées des herbes ondulant sous le vent, une œuvre organique et sensorielle, bien plus subtile que la représentation objective du prisme oculaire. Jacques ne se contentait pas de voir, il sentait, il anticipait, il savait..."

 

St Agnan en Vercors, Elie garde forestier  y découvre en pleine nature montagneuse le corps pendu d’une femme. Il prévient son supérieur le chef Réda qui informe la gendarmerie. De son côté, pour un tas de raisons logistiques c’est Nina Mellinsky qui est dépêchée sur la scène de crime : un arbre totem au centre d’une nature enneigée et hostile. Sur le corps de la victime, une bien étrange inscription qui réveille de terribles angoisses chez Elie le garde forestier. Voilà comment Niko Tackian nous embarque en plein hiver dans un Vercors rude, froid, intime dans son nouveau roman « Solitudes » .

Nina , lieutenant de police trentenaire travaille avec Charlie un co-équipier qui lui permet de rendre un peu les armes et d’abattre les murs de solitude et de protection que la jeune femme s’est forgée après un évènement traumatisant et culpabilisant. Elle croisera durant son enquête des personnages attachants et vrais, issus de mondes différents mais qui se sont trouvés au sein de ce Vercors révélateur.

Il y a le chef Réda employé de l’ONF, panaché d’amérindien après un séjour essentiel dans une communauté du Québec et issu de l’immigration algérienne. C’est un homme épris de montagne, d’espace et relié aux énergies de la terre. Il est très proche de Jacques le vieux berger aveugle qui sent tout ce qu’il ne voit pas dans un kaléidoscope d’auras aux couleurs fantastiques. Lui même initie  au métier de berger Piotr un jeune ukrainien taiseux et qui lui aussi est venu cacher ses blessures au sein de ces montagnes salvatrices.  Et enfin Elie, personnage troublant, garde forestier amnésique d’une partie de sa vie dont il garde une trace indélébile sur le visage et qui semble être au cœur de l’énigme que représente cette enquête.

Niko Tackian nous emporte dans un policier aux chapitres courts et rythmés avec des personnages nuancés, fragiles et forts à la fois. On passe des uns aux autres imbriqués dans la recherche de la « vérité ». L’auteur connait le Vercors, les couleurs, la fraîcheur, la froideur, l’immensité et la rudesse de ses paysages majestueux et intimidants de montagne, les vallées encaissées, la neige, la tristesse solitaire parfois que reflète l’ensemble de tout cela est décrit avec une justesse et un brio de simplicité évidente.

On croise dans ce livre des loups totem, des rituels chamaniques, des hommes et des femmes à la recherche de l’Essentiel, de l’Essence, du Tout.

Un très bon moment de lecture, c’est ma première lecture de l’auteur mais c’est une évidence pas la dernière.

 

"Elle pouvait ressentir la pulsation tellurique du sol s’élever vers le cosmos planétaire et la manière dont elle s’inscrivait dans cette chaîne du vivant où toute chose est liée en dépit des apparences"