mardi 5 septembre 2023

Perspective(s) - Laurent Binet

CHRONIQUE DE SCARLETT

Résumé : Florence, 1557. Le peintre Pontormo est retrouvé assassiné au pied des fresques auxquelles il travaillait depuis onze ans. Un tableau a été maquillé. Un crime de lèse-majesté a été commis. Vasari, l’homme à tout faire du duc de Florence, est chargé de l’enquête. Pour l’assister à distance, il se tourne vers le vieux Michel-Ange exilé à Rome.   La situation exige discrétion, loyauté, sensibilité artistique et sens politique. L’Europe est une poudrière. Cosimo de Médicis doit faire face aux convoitises de sa cousine Catherine, reine de France, alliée à son vieil ennemi, le républicain Piero Strozzi. Les couvents de la ville pullulent de nostalgiques de Savonarole tandis qu'à Rome, le pape condamne les nudités de le chapelle Sixtine. 





Chronique :

«Mais vous savez, divin Maître, que le style n’est rien sans l’esprit, ou plutôt que le style et l’esprit sont une seule et même chose..»

 

Le peintre Pontormo est retrouvé mort à Florence dans une chapelle où il œuvrait depuis des lustres, et voilà que chacun y va de son interprétation. Pour l’une il s’est suicidé, ensuite il s’avère qu’il a été assassiné mais par qui, pourquoi ; les questions sont multiples et les réponses foisonnent avec des interprétations que chacune ou chacun des personnages de ce roman écrira en fonction de sa sensibilité, de son vécu, de ses intérêts aussi ; donnant à l’enquêteur Giorgio Vasari  peintre de son état et nommé par Cosimo le duc de Florence beaucoup de fil à retordre ou à détordre…

En fait, dans le dernier roman de Laurent Binet «Perspective(s) », le narrateur découvre par hasard un lot de lettres datant du 16è siècle lors d’un séjour en Toscane, et ce sont ces correspondances qu’il nous offre à découvrir. On croise donc la plume de Marie et Catherine de Médicis, la première naïve et amoureuse quand la seconde manipule en fine tacticienne politique. Le grand Michel-Ange vieillissant et en mission « divine » à Rome est sollicité par ses confrères de Florence pour donner son avis sur cette énigme qui secoue le milieu des peintres déjà bien stressé par les nouveaux dictats imposés par le clergé qui souhaite que Florence entre autre s’assagisse.

Le roman de Laurent Binet est une intrigue policière où les différents protagonistes interagissent par le mode épistolaire, ce qui confère au livre une originalité rafraichissante et intéressante. C’est aussi un délicat plaidoyer pour ces magnifiques peintures de l’époque malmenées par la religion et les puissants qui par le jeu de leur favoritisme fluctuant attise le doute et la jalousie entre ces prestigieux artistes. On découvre Florence la flamboyante, la sphère religieuse fondamentaliste, les artisans avides de justice sociale et au milieu de tout ce foisonnement de missives nait une romance …

Les perspectives sont les nuances de nos vies à tous et la Perspective est le propre des artistes.

Voici une lecture de rentrée littéraire qui nous fait voyager en Italie auprès de personnages illustres et moins connus à travers leurs échanges épistolaires ce qui rend ce roman original et savoureux.

 

« Nous avons voulu peindre le monde à notre manière. Nous n’avons pas seulement voulu rivaliser avec Dieu, mais avons voulu modifier son œuvre, en redessinant le monde à notre convenance. Nous avons voulu la perspective, nous l’avons délaissée…».




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