jeudi 1 novembre 2018

La Mort selon Turner - Tim Willocks


Chronique de Scarlett
Traduction :Benjamin LEGRAND
Résumé Lors d’un week-end arrosé au Cap, un jeune et riche Afrikaner renverse en voiture une jeune Noire sans logis qui erre dans la rue. Ni lui ni ses amis ne préviennent les secours alors que la victime agonise. La mère du chauffeur, Margot Le Roux, femme puissante qui règne sur les mines du Northern Cape, décide de couvrir son fils. Pourquoi compromettre une carrière qui s’annonce brillante à cause d’une pauvresse ? Dans un pays où la corruption règne à tous les étages, tout le monde s’en fout. Tout le monde, sauf Turner, un flic noir des Homicides. Lorsqu’il arrive sur le territoire des Le Roux, une région aride et désertique, la confrontation va être terrible, entre cet homme déterminé à faire la justice, à tout prix, et cette femme décidée à protéger son fils, à tout prix.




 


Chronique




« Ces deux dernières années, il s’était mis au défi d’entrer en relation avec les sonates pour piano de Beethoven…Son cœur était déchiré en deux, et en même temps guéri par un autre cœur solitaire, battant toujours malgré les siècles, la distance et les mondes qui les séparaient.»

Le dernier Tim Willocks , « La mort selon Turner » est un vrai, vrai bon cru.

 C’est un roman qui nous emmène dans le township de Nyanga, un coin glauque et dangereux près du Cap, un lieu où est retrouvée morte, les organes broyés une pauvre adolescente errante et maigrichonne. Dès le départ, on sait ce qui s’est passé, et donc la parfaite maitrise de ce roman noir réside dans bien autre chose que l’intrigue.

On y croise des personnages hauts en couleur, à commencer par Turner flic noir aux yeux verts, possédant une énergie létale, une ténacité implacable, une aura de prédateur et un mental de maître Zen (çà existe dans la vraie vie des mecs comme lui ?). Dans sa quête, il devra affronter un ancien mercenaire et ancien militaire Hennie compagnon amoureux et admiratif de la reine Margot, celle-ci assise sur des mines de manganèse, une femme intelligente, avec une volonté de fer et un amour infini pour son fils Dirk. Turner croisera des femmes et des hommes qui se trouveront happés dans la tornade que va créer le flic sur son passage. Des hommes comme Jason, fermier plus complexe et sensible que ne le laisse supposer son apparence, ou  Mokoena flic ambigu ancien héros de la lutte nationale ayant laissé tomber ses idéaux, Iminathi belle noire à la fois révoltée et résignée.

Ce roman palpitant nous balade dans  des contrées d’Afrique du Sud, on y survole de haut la problématique de l’histoire de ce pays car là n’est pas le fil conducteur du livre. C’est un mélange de Mad Max et d’Il était une fois dans l’Ouest .

C’est un livre avec des personnages puissants, attachants dans leurs fêlures sous la plume de l’auteur.
 Un héros fascinant à la fois vainqueur et vaincu, désespéré et flamboyant, des méchants subtilement nuancés et une écriture d’une précision implacable et admirable. Ce roman est une réussite par l’énergie redoutable qu’il recèle, la profonde humanité des personnages, par les mots justes et précis qui s’agencent pour nous parler de l’humain, de ses rêves, ses doutes, ses dérives, de la tragédie de la vie et de la mort dans un rodéo haletant qui ne laisse pas de temps libre au lecteur.

J’avais tellement aimé la lecture de la Religion, Green River ou les douze enfants de Paris  et là dans un tout autre registre ce fut un vrai régal et je vous conseille absolument le dernier Tim Willocks. Merci Monsieur pour cette lecture passionnante.

«-Eteins-toi, éteins-toi, court flambeau.
-C’est vrai, c’est vrai. Ses yeux brillaient de larmes contenues. Sa voix était rauque d’émotion. Et tous nos hiers n’ont fait qu’éclairer pour des fous le chemin de la mort poudreuse. Le pouvoir des mots, leur beauté, les plongèrent dans le silence et pendant un moment une communion muette régna entre eux, qui ressemblait à la paix. Ou à quelque chose d’encore plus mystérieux et précieux»





2 commentaires:

  1. Je le commence demain ! Je te lis donc en diagonale ;-)

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  2. Bonsoir Léa Touch Book, je viens de lire ce roman en 2 jours : haletant, violent, un tantinet "gore" (p 260...). Pour ceux qui aiment, c'est du grand art. Bonne soirée.

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