mercredi 3 février 2021

La loi des lignes - Hye-young Pyun

Traduction : Lim Yeong-hee (et Catherine Biros)

Résumé : Lorsque sa demi-sœur est retrouvée noyée dans une rivière, Ki-jeong part à la recherche de réponses. Pendant ce temps, Sae-oh, qui n'a pas quitté sa maison depuis des années de peur d'être rattrapée par son passé, découvre que son père a été tué dans une explosion de gaz. La police est impatiente de résoudre ces deux affaires de suicides vraisemblablement justifiés par des dettes insurmontables.

 

 

 

 

 

 

 

Chronique : À l'image de Jeong You-jeong, Pyun Hye-young est une romancière coréenne reconnue, une auteure à découvrir d'urgence.

Si je n'avais pas été pleinement convaincue par la lecture de son dernier roman (Le Jardin) notamment en raison du dénouement un peu trop brutal (mais je vous en conseille tout de même la lecture, il a reçu le prix Shirley Jackson), La loi des lignes est à mes yeux le chef d'œuvre de Hye-young Pyun.

Comment expliquer ce ressenti si personnel et particulier que j'ai pu éprouver tout au long de cette lecture au point d'avoir parfois les larmes aux yeux ?

La loi des lignes n'est pas un polar classique, ne vous attendez pas à une incroyable tension, à un tueur en série, à des morts qui parsèment le livre, à des rebondissements inattendus. Ce titre est plutôt un roman noir qui se mêle à un roman social. Il y est question de personnes, d'être humains qui font face à des situations compliquées et sombres.

D'un côté il y a Sae-oh, une jeune femme qui vit enfermée chez elle avec pour seule compagnie son père, de l'autre il y a Ki-jeong, une professeure. Leur vie va être bouleversée par un drame : Sae-oh va perdre son père qui s'est a priori suicidé en raison de ses dettes, Ki-jeong va apprendre que sa sœur se serait aussi suicidée en se noyant. Chacune va remonter la piste pour comprendre ce qui a amené ses êtres chers à commettre l'irréparable, leurs routes vont se croiser et s'entremêler par des liens imprévisibles.

Si j'ai apprécié l'intrigue autour de Ki-jeong, j'ai été particulièrement marquée par celle de Sae-oh. L'auteure transmet parfaitement le désespoir de cette jeune femme qui a perdu sa dernière bouée de sauvetage, son phare, sa raison d'être. Elle va alors survivre en basant son existence uniquement sur son désir de vengeance : trouver le responsable et le punir. Le lecteur va ainsi progressivement comprendre les secrets des différents personnages, aucun n'est totalement innocent.

La force de ce livre repose sur la capacité de la romancière à mettre en lumière la détresse de ses personnages à l'image de toute une partie de la population. De montrer l'angoisse financière, de souligner les inégalités, l'incapacité à faire face aux dettes, de vivre une vie décente dans un monde où l'argent est omnipotent. Ce roman est une métaphore universelle de l'injustice sociale. Les humains et leurs rêves se brisent inévitablement face au mur du capitalisme, à l'argent, au consumérisme et aux grosses entreprises/banques qui broient tout sur leur passage.

En définitive, La loi des lignes est pour moi le meilleur roman de Hye-young Pyun, c'est un texte poignant et intime. C'est un coup de cœur émotionnel très personnel, mon premier coup de cœur de l'année.




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